Du blog Phytospiritualité - mercredi 10 février 2016
Colette Roumanoff et ses enfants font part du décès de Daniel Roumanoff survenu le 1er décembre 2015, à Paris. Lors de la dernière fête des pères, Anne Roumanoff avait révélé la maladie dont souffrait Daniel depuis 2006, d’un petit texte très touchant sur Facebook. " Il a presque 80 ans, confiait-elle alors, ses cheveux sont tout blancs, ses petits-enfants l’appellent ‘papou’. Il me regarde d’un air absent. C’est toujours la question que les gens posent : ‘D’accord, ton père a Alzheimer, mais il te reconnaît ou pas ?’ Je prends sa main, je la serre. Il n’est plus ce qu’il a été, mais il est là, bien vivant. Il me sourit et je retrouve l’étincelle de malice dans ses yeux."
En hommage à Daniel Roumanoff, je vous propose un article extrait de Terre du Ciel n°15
Disciple d'un maître indien — Swami Prajnanpad —, Daniel Roumanoff a été en même temps un homme d'affaires qui a parfaitement réussi. Ces deux trajectoires sont-elles compatibles ? Et comment les vivre pleinement toutes les deux ?— Est-ce la spiritualité ou le commerce qui a été premier dans votre vie ? J'ai fait des études commerciales à HEC. Mais c’était avec une visée disons altruiste, philanthropique. J’étais scandalisé par l’inégalité qui existait entre les pays riches, qui brûlaient leur surproduction. et les pays pauvres qui mouraient de faim. Mon idée était d’apprendre les mécanismes qui permettraient l'acheminement des surplus vers les pays pauvres. Naturellement ce n’est pas cela qu’on enseigne à HEC. Ce sentiment d’injustice, et la recherche des moyens permettant d’y mettre fin, me sont toujours restés. — Et quand vous avez eu votre diplôme d'HEC en poche ?
HEC a été une grande déception. Je suis alors allé en fac où j’ai pris des cours de psychologie, de sociologie, d’économie pour essayer de comprendre les grands mécanismes de l’économie, les lois des échanges internationaux. J’étais plutôt à gauche. Je voulais changer, transformer la société. Puis je suis allé en Israël vivre dans un kibboutz.Cette vie collective dans laquelle on ne manipulait plus individuellement d’argent, où les problèmes étaient résolus par la communauté sur un pied d’égalité entre tous, était le prototype môme de la société socialiste à laquelle j’aspirais. Naturellement cela fut une déception épouvantable. C’est à ce moment que j’ai pris conscience que les problèmes ne pouvaient être résolus de l’extérieur, mais demandaient une solution venant de l’intérieur. — Pourquoi cette déception dans les kihhoutzs ? Parce que si, effectivement, les gens étaient nourris, logés et n’avaient pas de problèmes d’argent, ce mode de vie créait d’autres problèmes que les sociétés capitalistes n’ont pas. Par exemple, ces gens étaient des travailleurs agricoles, mais il fallait constamment prendre des décisions d’ordre administratif. Alors, après leur journée de travail dans les champs, les gens se trouvaient obligés de participer au comité du poulailler, au comité des tomates, au comité de l’éducation, etc. C'était chaque fois des heures à discuter des problèmes, et quasiment toutes les soirées y passaient. Par ailleurs les décisions se prenaient à la majorité, ce qui créait beaucoup de frustrations car les priorités de chacun n'étaient pas les mêmes. Certains auraient préféré moins dépenser en nourriture pour mieux élever leurs enfants, alors que pour d'autres la priorité passait par les systèmes d'irrigation ou de nouvelles constructions. J'ai pris conscience que, focalisé sur un mode de vie qui nous paraît mauvais, on cherche à l'améliorer, mais qu'ainsi on crée de nouveaux problèmes ; et ainsi de suite, sans fin.C’était, en fait, la contestation de l’idée même de progrès : chaque progrès crée un nouveau mal qui, sur un autre plan, est une régression. — La solution n'apparaît plus dans la structuration sociale La solution n’était plus dans la recherche d’une meilleure organisation sociale. Toutes les améliorations qu’on pouvait apporter passaient par des hommes, et ces hommes obligatoirement déformaient l'amélioration et créaient une réaction, une régression. C’est-à-dire que dans l’organisation d'une société il y a les vices de fonctionnement que toute organisation génère. A un certain moment on en prend conscience et on modifie la structure. Mais celle-ci entraînera d’autres problèmes, etc. C’est sans fin, et sans solution.
— C’est de là qu’est venue votre prise de conscience de la nécessité d'un travail intérieur ?
Oui. La solution n’est pas dans le changement extérieur, mais dans la transformation intérieure.
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