La réalisatrice de La tête haute a adapté l'épopée de la Brestoise Irène Frachon pour dénoncer les méfaits du Mediator. Un film d'une grande humanité qui sort mercredi.
Emmanuelle Bercot l'avoue sans réticences. Sans la personnalité exceptionnelle de la pneumologue Irène Frachon, la réalisatrice et actrice de 49 ans ne se serait pas lancée dans l'aventure de ce film.
Lors de sa rencontre avec trois de nos lecteurs, la cinéaste est également revenue sur son parcours « chaotique ». « Je suis venue tard au cinéma. De 17 à 27 ans, je voulais faire énormément de choses et pour choisir, il fallait renoncer ! Alors j'ai fait beaucoup de danse, de théâtre… Avant de rejoindre la Femis (la grande école de cinéma de Paris). »
Ça tombe bien, l'un des lecteurs invités à rencontrer Emmanuelle Bercot, Angelo Pichon, 19 ans, en licence d'arts du spectacle à Rennes, est tenté par cette école et se demande comment aborder la sélection d'entrée. « Il faut être soi-même. Ne surtout pas jouer un rôle. Car ce qui fait la différence, c'est ta personnalité et ta passion. »
Et cette école lui a été utile ? « Sans elle, je ne serais pas là où j'en suis aujourd'hui. À 27 ans, je n'avais plus le temps de faire le parcours du combattant pour devenir réalisatrice. Là, on a des moyens techniques exceptionnels. On fait les choses en groupe. Et j'ai eu une chance inouïe. J'ai été primée à Cannes pour mes premiers court et long métrages. »
Une chance ? « Je crois énormément au travail, mais il faut un peu de chance. Il peut arriver des choses exceptionnelles à des personnes qui ne demandent rien. Mais je connais aussi des gens qui ont un talent immense et n'atteindront jamais leur but. »
Comme les trois lecteurs connaissent bien les différentes facettes du travail d'Emmanuelle Bercot, la discussion peut aussi partir sur d'autres voies. Par exemple avec Estelle Dupin, 23 ans, qui travaille dans l'aide aux personnes âgées dans la Manche : « Des rôles comme celui que vous aviez dans Mon roi (de Maïwenn), c'est éprouvant à jouer ? » « Pas douloureux mais, oui, éprouvant. Car il faut parfois garder l'intensité émotionnelle pendant des heures. »
Un travail qui a fait bouger le rapport de la réalisatrice à ses propres acteurs ? « C'était mon premier rôle de cette envergure. J'y ai pris conscience des fragilités de l'acteur. Du sentiment de solitude qu'on peut ressentir. Je crois que désormais je suis plus attentive à eux. J'essaie de ménager un espace pour leurs émotions. »
Du coup, Ophélie Broudin, 24ans, elle aussi en arts du spectacle à Rennes, se demande si, comme Maïwenn, elle laisse de la place à l'improvisation lors de ses tournages ? « Absolument pas. Maïwenn sait gérer ça mais beaucoup d'acteurs sont très mauvais en impro. Et puis je suis très crispée sur les dialogues. J'y tiens. »
L'amour de Deneuve
Pas d'impro, mais des acteurs non professionnels ? « J'essaie toujours d'avoir moitié-moitié entre les pros et les non-pros. Tout le monde ne peut pas être naturel devant une caméra, mais quand les non-professionnels ont ça, ils sont capables d'atteindre des moments de vérité que beaucoup d'acteurs n'ont pas. »
« Et d'où vient votre amour pour Catherine Deneuve ? » enchaîne Estelle. « De mon enfance. Dans ma génération, on a grandi avec elle. Avec l'actrice, la femme sublime, la mère et la sœur qu'on aimerait avoir. Je n'ai jamais perdu cet amour d'enfance. Je n'aurais jamais imaginé la filmer dans deux films (La tête haute et Elle s'en va). Et quand elle ne m'inspire pas, elle est de bon conseil. »
Pourquoi ? « C'est elle qui m'a conseillé Sidse Babett Knudsen pour jouer La fille de Brest. » Un bon conseil en effet.
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