8 juin 1897
Un jour, dans bien des années, tu comprendras tout à fait ce que tu es pour moi.
Ce que la source de montagne est à l’assoiffé.
Et si l’assoiffé est bon et reconnaissant, il ne va pas boire l’eau limpide pour y puiser énergie et fraîcheur, et repartir ensuite vers un nouveau soleil ; sous la protection de la source, et assez près pour entendre son chant, il construit une cabane et reste dans le paisible vallon verdoyant jusqu’à ce que ses yeux soient las de soleil et que son coeur déborde de richesse et de compréhension. Je construis des cabanes et – je reste.
Ma source limpide ! Quelle gratitude je voudrais t’exprimer. Je ne veux voir ni fleurs, ni ciel, ni soleil – sauf en toi. Tout est beaucoup plus beau et beaucoup plus féerique sous ton regard : la fleur à ton abord – je le sais pour avoir dû autrefois voir les choses sans toi – frissonne dans la mousse, seule et languissante ; elle se reflète dans ta bonté, lumineuse et légèrement vibrante, et touche presque de sa petite tête le ciel dont le rayonnement ressurgit de tes profondeurs. Et le rayon de soleil qui arrive poussiéreux et unique à tes confins se transfigure et se démultiplie en milliers d’étincelles dans les ondes lumineuses de ton âme. Ma source limpide. Je veux voir le monde à travers toi ; car ainsi je ne verrai pas le monde mais rien que toi, toi, toi !
Tu es mon jour de fête. Et quand je te visite en rêve, j’ai toujours des fleurs dans mes cheveux.
Tu es mon jour de fête. Et quand je te visite en rêve, j’ai toujours des fleurs dans mes cheveux.
Je voudrais mettre des fleurs dans tes cheveux. Lesquelles ? Aucune n’est d’une simplicité suffisamment touchante. En quel mois de mai les trouver ? – Maintenant, je crois que tu as toujours une guirlande dans tes cheveux – ou une couronne… je ne t’ai jamais vue autrement.
Je ne t’ai jamais vue sans le désir de t’adresser une prière. Je ne t’ai jamais entendue sans le désir de croire en toi. Je ne t’ai jamais attendue sans le désir de souffrir pour toi. Je ne t’ai jamais désirée sans me sentir autorisé à m’agenouiller devant toi.
Je suis à toi comme le bâton est au randonneur, mais je ne te soutiens pas. Je suis à toi comme le sceptre est à la reine – mais je ne t’enrichis pas. – Je suis à toi comme la dernière petite étoile est à la nuit, même si celle-ci ignore presque tout de son existence et de son scintillement.
René.
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