vendredi 9 septembre 2016

So so Proud



Mediator : Emmanuelle Bercot livre « le combat d’une 

femme hors du commun »

LE MONDE |   • Mis à jour le  | Par  
Une rencontre déterminante avec Irène Frachon
C’est bien le profil et la détermination de la médecin qui ont décidé la cinéaste : « L’histoire du Mediator devenait le combat d’une femme hors du commun, explique Emmanuelle Bercot. Une femme très naturelle, spontanée, pas du tout politique. Une personne ordinaire à qui est arrivée une histoire extraordinaire. Dotée d’une énergie incroyable, une femme très émotive qui peut passer très vite du rire aux larmes. Avançant sans cesse, quoi qu’il en coûte. » La réalisatrice est donc partante, et ce nom séduit Irène Frachon. « Ma bonne connaissance du milieu médical a dû jouer dans le choix d’Irène. Mon père était chirurgien cardiaque à l’hôpital Lariboisière. Lycéenne, un de mes loisirs préférés du mercredi était d’aller le voir opérer. J’ai toujours été fascinée par l’ambiance des salles d’opération. Je pense qu’Irène a été sensible à ça. »
Restait une question essentielle : à qui confier l’interprétation d’un tel personnage ? « Imaginez le souci, j’écrivais le scénario et je ne voyais aucune actrice française susceptible d’être Irène Frachon », se souvient Emmanuelle Bercot. La solution, c’est Catherine Deneuve qui la trouvera. « Un soir qu’on dînait ensemble - on venait de finir La Tête haute – elle m’a parlé de Sidse Babett Knudsen, l’actrice danoise qui, dans Borgen, interprète la première ministre du Danemark. Comme je ne connaissais ni l’actrice ni la série, je me suis précipitée dessus dès le lendemain. » Ensuite, tout va très vite. Rencontrée à Copenhague, Sidse Babett Knudsen accepte immédiatement le rôle. Quant à Irène Frachon, ce choix l’enthousiasme. « Je ne le savais pas, mais c’est une fan de Borgen. Etre incarnée par Sidse relevait pour elle du rêve absolu. »
Un « Erin Brockovich » à la française
Si vous ne venez pas au Monde Festival, où le film sera donné en avant-première, il vous faudra attendre le 29 novembre pour découvrir La Fille de Brest dans les salles de cinéma. C’est un film d’une grande force, qui fait penser à Erin Brockovich, de Steven Soderbergh. Et Sidse Babett Knudsen n’a pas à rougir de la comparaison avec la grande Julia Roberts. L’aspect documentaire de La Fille de Brest est, lui aussi, remarquable. Très juste d’un point de vue factuel, le film recèle deux séquences d’anthologie, une opération à cœur ouvert et une autopsie comme on n’en a sans doute jamais vu au cinéma. « De manière à ce que le spectateur puisse ressentir, presque physiquement, ce que le Mediator a provoqué chez certains patients, il était essentiel de montrer avec précision les ravages organiques causés par cette molécule », explique Emmanuelle Bercot.
Reste Irène Frachon, ou plutôt la vision qu’en donne Sidse Babett Knudsen. « Un médecin qui n’a jamais cherché à faire carrière mais qui, de l’avis général, est une excellente praticienne, analyse Emmanuelle Bercot. Si cette femme a réussi à aller au bout de son combat, c’est avant tout, je crois, du fait de son immense empathie pour les victimes. Et aussi de sa déontologie. Au fond, je dirais d’Irène Frachon qu’elle est une Juste. Une pure. Dans sa grande candeur, elle ne voit pas le mal. Elle n’est médecin que pour accompagner et soigner les gens. »
« Le monde est dangereux à vivre non pas tant à cause de ceux qui font le mal, mais à cause de ceux qui regardent et laissent faire. »
A un moment du film, Sidse Babett Knudsen dit : « Il n’y a pas de vrai combat sans peur. » En décembre 2015, interrogée par La Croix, Irène Frachon citait cette phrase d’Albert Einstein : « Le monde est dangereux à vivre non pas tant à cause de ceux qui font le mal, mais à cause de ceux qui regardent et laissent faire. » Emmanuelle Bercot commente : « C’est exactement ce que je pense. Nous sommes peu à pouvoir nous identifier à Irène Frachon. En revanche, nous sommes nombreux à pouvoir nous identifier à ceux qui regardent sans rien faire les autres régler les problèmes. »
Il y a quelques mois, dans Le Monde (daté 26 avril), la pneumologue s’insurgeait, encore et toujours : « Jamais à ce jour les laboratoires Servier, comme les experts de l’Agence nationale de sécurité du médicament, n’ont été sommés de rendre compte de ces attaques visant tous les lanceurs d’alerte ayant tenté d’empêcher l’un des plus grands drames sanitaires français. Pouvoir condamner les inqualifiables méthodes d’intimidation d’un laboratoire criminel, dès 1999, aurait sauvé des centaines de vie humaines. » Elle ajoutait : « Le premier qui dit la vérité doit être protégé ! » Comme cela arrive parfois, il aura fallu un film, et non un tribunal, pour que soit rendue justice à cette héroïne. Un film dont la sortie pourrait donner un nouveau souffle au combat d’Irène Frachon.
Dans le cadre du Monde Festival, La Fille de Brest sera diffusée en avant-première le samedi 17 septembre au Gaumont Opéra. La projection sera suivie d’une rencontre avec Irène Frachon, Sidse Babett Knudsen et Emmanuelle Bercot.



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