C'est un film plein d'énergie. Dès le générique, magnifique prise de vue d'une nageuse, seule, dans la rade de Brest. On comprend que c'est un moment pour «décompenser» de la vie trépidante d'un médecin hospitalier. La séquence suivante, dans une salle d'opération les images sont moins esthétiques. On suit, millimètre par millimètre une intervention à cœur ouvert, déterminante pour comprendre et si possible guérir une malade, traitée au Mediator. Ce que l'équipe médicale trouve et les clichés pris au vif par la pneumologue, soulèvent la question de la nocivité de ce médicament, un coupe-faim des laboratoires Servier causant des graves lésions des valves cardiaques (valvulopathies) et d'hypertension artérielle pulmonaire, pathologie rare et incurable.
 L'affaire Mediator est lancée!
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Avec l'ardeur que la recherche de la preuve déclenche, Irène Frachon se lance, après avoir persuadé -et démontré- la justesse de son hypothèse, avec la petite équipe de recherche du CHU de Brest, qui accepte de l'épauler. On dit aujourd’hui une bonne énergie partagée. 
Le combat d' Irène Frachon avait commencé en 2007. Le film concentre l'action dans la période où les protagonistes se battent pour faire reconnaître le crime-médical qui est en train de se dérouler (et qui dure depuis trente ans). Les séquences des débats dans le cadre de l'AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé), où l'ironie et le mépris des conseillers de Servier pour ces «petits apprentis chercheurs bretons» s'accompagne de la compréhension et, peut-être compromission, de l'Agence officiel avec le deuxième grand laboratoire français. 
On sent, et le film le retrace avec efficacité et finesse, qu'il s'agit pour les uns de la vie des malades qui est en cause, et pour les autres l'affirmation des prérogatives des laboratoires "sachants-puissants" et d'une administration bureaucratique et zélée qui n'accepte pas de questionner les autorisations déjà émises. 
Finalement la nocivité du Mediator est établie. En 2009 il est retiré du marché. Mais le combat continue et ce n'est qu'en octobre 2015 que, pour la première fois, la responsabilité civile des laboratoires Servier est reconnue par la justice et confirmée en appel cette année. Ajoutons que l'affaire au pénal ne sera pas jugée avant 2018 et, pour l'heure, Servier renâcle à indemniser les victimes. 
L'efficacité du propos de ce film est aussi la qualité de l'interprétation de Sidse Babett Knudsen, (artiste danoise qui a interpreté le Première ministre dans une série, très politique, Borgen. Elle a mais aussi joué dans le filme L'Hermine, aux côtés de Fabrice Luchini). L'actrice dispose d'une énergie naturelle, transmissible, très vivante et drôle. Il y a une sorte de légèreté malgré la gravité de l'enjeu, et qui suscite,  une forte empathie sur son engagement. Il semblerait qu'Irène Frachon, très professionnelle et sérieuse dans sa fonction est aussi riche de fantaisie, appuyée par une famille joyeuse, que le film fait bien ressortir. Le professeur chercheur, Le Bihan, qui la soutient avec son équipe (et qui perdra les crédits de recherche du fait de son engagement) est joué avec délicatesse par Benoît Magimel. Il montre bien le doute, la peur, l'engagement, les engueulades et finalement sa détermination posée en appuyant ce combat. 
Ce n'est pas un film où il y aurait des purs et des affreux, dans un combat manichéen. Ce risque, la réalisatrice a su l'éviter, racontant l'histoire d'un engagement qui pourrait illustrer la naissance d'un «lanceur d'alerte». Ce n'était pas cela l'intention d'Irène Frachon. Plus que de dénoncer, sa détermination était d'arrêter, de mettre hors de l'état de nuire un médicament-tueur. Ce film montre aussi, par touches, sans discours mais bien précisément, «la collusion ou la compromission ou l’accommodement» des pouvoirs publics, à travers l'Agence officielle, avec un grand laboratoire. Au-delà de l'engagement pour sauver des vies, c'est aussi cet aspect plus institutionnel que le film a su souligner. 
Un film nécessaire à voir et à conseiller pour une prise de conscience salutaire...
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Il n'est pas inutile de rappeler qu'avant, pendant et après le scandale du Servier, un ancien ministre socialiste, Henri Nallet, était conseiller, bien rémunéré, auprès de M. Servier. Il est toujours dans les «petits papiers» du pouvoir. Le ministre de l'agriculture, M. Le Foll lui a même trouvé un job, à 76 ans, en le nommant président de l’Observatoire de l’enseignement technique agricole, il y a un an. 
Par ailleurs il est le Président de la Fondation Jean Jaurès. Dans l'affaire Mediator-Servier, l'ancien ministre n'est que témoin assisté. Il ne s'agit ici de l'incriminer en quoi que ce soit mais de souligner cette «corruption démocratique» où l'éthique et l'intégrité aurait exigé que le collaborateur du patron d'un laboratoire reconnu responsable civil de la mort de centaines de personnes s'abstienne de ce genre de fonctions, et de l'usurpation de la mémoire de Jean Jaurès.