samedi 14 septembre 2019

La peinée

Pour tenir, il m'arrive de prier. De vieux restes. Mais ça marche. Difficile de penser à deux choses à la fois. Mais quelle vigilance, quelle attention requise à chaque instant pour être à soi-même son propre thérapeute ! Prendre soin du corps pour que l'âme s'y loge. Attentive au moindre signe de resserrement qui laisse le corps exsangue, au moindre signe de rétrécissement qui compacte l'âme avec la souffrance. Parce que trop d'étroitesse assèche l'âme.
Il m'est arrivé bien des fois d'être soudainement prise par l'angoisse. Avec le sentiment que, si je ne réagis pas rapidement, je vais, dans les minutes qui suivent, me retrouver dans un état de malaise tel que je ne pourrai plus rien pour moi. Il faut que je fasse vite. Sitôt la sensation décryptée, j'entame un "je vous salue Marie" silencieux, mécanique, besogneux mais efficace. J'évite le plexus bloqué ou les entrailles en torpille et desserre l'étreinte des idées qui rongent. Je n'échappe pas à ce qui me traverse : la peur panique, la rage désespérée - mais j'évite de me laisser saturer par ces vagues émotionnelles. De prendre ces tempêtes pour le réel. Un réel absolu.
Quand je m'arrête, je suis quelques minutes plus loin. C'est toujours ça de gagné.

Maela Paul - La Petite Colère (L'Harmattan) 
Peinture : REMBRANDT - La peine

Merci à Maela pour cette description si juste , Quelle vigilance en effet , quelle attention de chaque instant en effet  Quelle connaissance de la souffrance, quelle rédemption pour nous tous par les mots . Bravo.

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