Fête de famille, riche de sa galerie de personnages pittoresques, est une comédie pleine de fureur et de tendresse dans laquelle Cédric Kahn expose son point de vue sur la famille.
Synopsis: « Aujourd’hui, c’est mon anniversaire et j’aimerais qu’on ne parle que de choses joyeuses ».
Andréa ne sait pas encore que l’arrivée « surprise » de sa fille aînée, Claire, disparue depuis 3 ans et bien décidée à reprendre ce qui lui est dû, va bouleverser le programme et déclencher une tempête familiale.
Critique : Il aura fallu attendre le onzième long-métrage de Cédric Kahn pour le voir s’emparer d’un sujet qui a souvent inspiré le cinéma, la famille. Il apporte au sujet sa touche personnelle à travers cette histoire qu’il avoue porter en lui depuis longtemps, sans ne s’être jamais autorisé à la raconter. La famille est-elle source de névroses ou au contraire le meilleur rempart contre la solitude et la folie ? Question universelle à laquelle le réalisateur se garde bien de répondre, laissant à chacun le soin de se forger sa propre opinion à partir des éléments qu’il développe.
Fête de famille, une tragi-comédie moins austère que Festen
Fidèle à son attachement pour les figures de marginaux, il organise son récit autour du duo Claire /Romain (Emmanuelle Bercot)/Vincent Macaigne), les deux éléments perturbés et perturbateurs de cette famille qui cultive déjà plus que de raison fantaisie et excès. Certes, le thème évoqué (la révélation de secrets familiaux à l’occasion d’un anniversaire) et la construction théâtrale (unité de lieu, de temps et d’action) ne sont pas sans rappeler le célèbre Festen du danois Thomas Vinterberg. Pourtant, en choisissant de poser un regard plus bienveillant qu’austère sur cette joyeuse famille de doux-dingues installée dans un cocon de nature chaleureuse, certes autant capable de violence que de solidarité, les scénaristes (Cédric Kahn assisté de Fanny Burdino et Samuel Doux) optent pour la tragi-comédie plutôt que la tragédie pure, faisant même le pari d’insérer deux mises en scène internes (Romain qui se prétend cinéaste filme sa famille et Emma, la fille de Claire, répète une pièce de théâtre qu’elle doit interpréter lors du repas d’anniversaire) histoire d’aérer le déroulement d’un récit souvent abrupt.
De quoi ça parle?
Au cœur d’une imposante bâtisse au charme désuet, plantée dans un coin perdu du Lot-et-Garonne, dont le magnifique jardin enclavé contribue à souligner la force des liens familiaux, s’organisent, dans la joie et la bonne humeur les préparatifs d’une fête jusqu’à ce qu’un coup de téléphone inattendu annonce l’arrivée de Claire, la fille d’Andrea (Catherine Deneuve). Accueillie dans un premier temps avec effusion, sa présence ne tarde pas à fissurer le groupe. Les révélations tout d’abord ténues sur son passé surgissent peu à peu, mais demeurent floues et désordonnées. Les questions autour de sa personnalité s’amoncellent, le mystère s’épaissit, estompant progressivement l’aspect familial pour laisser place à une investigation psychologique qui se révèle finalement bien plus fructueuse que ce qu’elle promettait. Mais au-delà de son scénario, dont les scènes parfois intempestives gêneront sans doute les défenseurs d’un certain conformisme familial, c’est grâce à l’équilibre de sa distribution mêlant judicieusement comédiens plus que confirmés, metteurs en scène/acteurs (dont Cédric Kahn lui même) et une multitude de seconds rôles de qualité, que ce film vibre.
La grande Catherine
Si la reine Catherine prête sans faillir son aura et sa présence à cette cheffe de famille, pleine d’humanité, déchirée entre son amour maternel et les dérives de sa fille, elle ne profite jamais de son statut de « star » pour voler la vedette à ses camarades de jeu. C’est ainsi qu’ Emmanuelle Bercot, pivot central de cette Fête de famille, a toute latitude pour dévoiler ses qualités d’interprète en retranscrivant les moindres détails du caractère extrême de son personnage, pendant que Vincent Macaigne use de son entrain habituel pour rendre attachant ce frère au comportement trouble et ambigu. Quant à Cédric Kahn, il se révèle parfaitement convaincant dans le rôle de l’aîné moralisateur. Ce quatuor de talent s’enrichit de figures pas vraiment secondaires pour nous proposer une tranche de vie originale et festive, entre démesure et réalisme, entre égarement et libération.
Le film est proposé en sélection du Festival du Film Francophone d’Angoulême (site officiel de la manifestation).
Critique de Claudine Levanneur
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